dimanche 30 mars 2014

Des flux de S-SW plus fréquents sur l’Europe occidentale

Comme je l'avais déjà évoqué dans un précédent post en mars 2007, la fréquence toujours plus importante des flux de S à SW semble expliquer en grande partie la hausse des températures observée sur toute l’Europe de l’Ouest depuis plus d’un siècle.
Carte de localisation
(Cliquez pour agrandir)
Après un automne 2006 puis un hiver 2006-2007 exceptionnellement chauds sur la majeure partie de l’Europe, j’avais saisi l’occasion de cet événement pour présenter le graphique ci-dessous, dont je propose aujourd'hui une mise à jour. On constate sur ce graphique une formidable corrélation (ou covariation) entre le nombre de jours avec un vent moyen de secteur S à SW et la température moyenne à De Bilt (Pays-Bas) sur la période automne-hiver. La tendance à la hausse conjointe de la fréquence des flux de S-SW et de la température moyenne depuis au moins 1905 perdure toujours, tandis que l'on enregistre sur la dernière période un record de 119 jours avec un vent de secteur S à SW (précédent record : 106 jours en 1924-1925).


Sept ans plus tard, une grande partie de l’Europe a connu à nouveau un hiver 2013-2014 particulièrement doux. Comme on peut le voir sur le deuxième graphique ci-dessous, la température moyenne sur la saison hivernale à De Bilt atteint +6,1°C, comme au cours de l’hiver 1989-1990, soit juste derrière le record détenu par l'hiver 2006-2007 (+6,6°C).
Mais l’événement majeur de cet hiver 2013-2014 est le nombre exceptionnellement élevé de jours avec vent de secteur S à SW : 74 jours sur 90 (soit 4,1 jours sur 5), contre seulement 60 jours au cours de l’hiver 1989-1990 !


Sur le 3e graphique ci-dessous, on constate que l’hiver 2013-2014 a été surtout marqué par une hausse spectaculaire du nombre de jours avec un vent de secteur S : 49 (dont 19 en janvier 2014, soit un record absolu tous mois confondus depuis 1905), contre 31 en 1924-1925 !
Cet événement était d'autant moins prévisible qu'il s'inscrit plutôt paradoxalement dans une tendance à la baisse en hiver de la fréquence des flux de S au profit d'une hausse de la fréquence des flux de SW.



Le tableau ci-dessous présente de manière synoptique un comparatif climatologique de 4 hivers remarquables observés à la station néerlandaise de De Bilt.

On constate tout d'abord le caractère très dépressionnaire de l'hiver 2013-2014 : une pression moyenne de 1008,5 hPa, soit la 8e plus basse valeur à la station depuis 1850 (record : 1004,7 hPa durant les hivers 1914-1915 et 1935-1936) ; un fait qui n'est pas isolé puisqu'on relève par exemple à Brest (France) une moyenne de 1007,9 hPa, soit le 3e hiver le plus dépressionnaire à la station depuis 1950 (records : 1006,9 hPa en 1965-1966 et 1007,3 hPa en 1978-1979). Notons que les mois de janvier et février 2014 ont été particulièrement dépressionnaires : 1004,2 hPa à Brest en janvier (un record mensuel depuis 1949), 1005,5 hPa en janvier à De Bilt (8e plus basse valeur en janvier depuis 1849) et surtout 1003,1 hPa en février (2e plus basse valeur en février depuis 1849, ex æequo avec février 1879, le record datant de février 1937 avec 1002,7 hPa).
Carte synoptique de surface du 27/01/1963 pour l’Europe
On constate également conjointement au caractère dépressionnaire de l'hiver 2013-2014 la prédominance exceptionnelle des flux de S-SW, contrairement à l'hiver 1962-1963 (qui concentre d'ailleurs à lui seul une bonne partie des valeurs extrêmes de ce tableau) au cours duquel on avait enregistré des températures exceptionnellement basses en présence de masses d'air plus stable et anticyclonique et d'un flux de N-NE très marqué (45 jours contre 13 jours avec vent de secteur S-SW).
Par ailleurs, en raison d'un courant perturbé bien établi tout au long de l'hiver 2013-2014 et du passage successif de plusieurs grosses tempêtes sur la façade atlantique, le vent a atteint une vitesse moyenne de 4,63 m/s à De Bilt (une des plus élevées depuis les années 1960), contrairement à l'hiver 1962-1963 marqué par une plus grande stabilité de l'air et des conditions plus anticycloniques (cf. carte ci-contre).
Notons aussi que les hivers les plus chauds (1989-1990, 2006-2007 et 2013-2014) ont été enregistrés à chaque fois quand l'indice NAO était positif, contrairement à l'hiver le plus froid de l'histoire (1962-1963) qui est intervenu dans un contexte de NAO remarquablement négative.
Champ de pression moyen en surface
en Europe en février 2014

Notons enfin que l'hiver 2006-2007 a été plus chaud que l'hiver 2013-2014, en raison notamment d'une nébulosité plus importante (un record même depuis le début des années 1950) qui s'est traduite par des températures minimales moyennes plus élevées. De plus, le contexte aérologique était sensiblement différent : durant l'hiver 2006-2007 De Bilt était située plus souvent sur la façade ouest d'une masse anticyclonique centrée sur l'Europe centrale qui dirigeait un flux de S-SW sur les Pays-Bas (tout comme durant l'hiver 1989-1990), contrairement à l'hiver 2013-2014 qui a été marqué par un flux de S-SW associé principalement à un puissant courant perturbé provenant de l'Atlantique.



Conclusion : une piste de réflexion à approfondir…
Les causes du réchauffement observé en Europe de l'Ouest paraissent identifiables par une analyse de la dynamique aérologique et de la nébulosité notamment. Plutôt que d'invoquer sans cesse l'effet de serre anthropique, il serait sans doute plus pertinent de s'interroger sur l'origine des phénomènes et sur les mécanismes qui régissent la dynamique aérologique, à toutes les échelles de temps et d'espace...


NB : cet article sera complété ultérieurement.
Source des données : KNMI